Suite à notre soirée bienveillance et en pleine préparation de notre journée Philosophie, RH et management, je me suis penchée sur l’un de nos intervenants, Eric Julien et sur son ouvrage co-écrit avec Marie-Hélène Straus, Le choix du vivant.
Dans ce dernier, ils énoncent 9 principes « pour manager et vivre en harmonie ». Une approche qui pourrait paraître banale aux vues de tous les livres traitant des sujets de management ! Mais là ou leur approche est intéressante, c’est qu’ils décrivent ces principes à travers un prisme scientifique et anthropologique, en s’inspirant de leurs observations au sein de la société des Kagabas (indiens Kogis).
En mettant en parallèle les déséquilibres rencontrés dans notre société et dans le monde du travail et la gestion et le lien avec la nature qu’ont les indiens kagabas, ils mettent en avant la nécessaire évolution que nous, Hommes du 21e siècle, devons mener afin d’établir des changements pérennes au sein de nos organisations.
Ces 9 principes sont les suivants :
- L’altérité, ou la prise de conscience de la nécessité de l’autre. Selon l’auteur, « reconnaître l’altérité, lui permettre d’exister est la seule condition pour libérer l’énergie qui met en mouvement les collaborateurs. » Développer l’esprit et la cohésion d’équipe, accepter les différences de l’autre, apprendre à travailler avec l’autre et réguler les énergies de chacun sont les missions premières d’un manager.
- L’interdépendance ou la pensée systémique comme base pour prendre de justes décisions. En rapprochant le fonctionnement d’une organisation au système cellulaire humain, animal ou végétal, les auteurs mettent en avant l’enjeu principal des managers d’aujourd’hui : pouvoir appréhender toutes les interactions du système, cartographier le rôle et les missions de chacun et prendre suffisamment de recul pour prendre des décisions justes.
- Le sens : donner du sens, et nous avons tendance à l’oublier, est l’un des premiers leviers de la motivation. Cela permet, comme c’est le cas dans tout corps vivant, de s’adapter, et de conserver un équilibre dynamique : « c’est la vision co-construite du dirigeant, le projet de l’organisation dans sa forme réussie, qui permet à chaque collaborateur de s’approprier une partie du projet et de se motiver pour participer à sa réalisation. »
- La communication, un principe qui paraît évident mais qui est souvent problématique dans nos structures de travail… Le dialogue se doit d’être rétabli et considéré comme « un mode de communication efficace » pour les managers. Ce dialogue nécessite évidemment la prise en compte des émotions de chaque partie prenante et le développement de l’empathie dans son mode de management. Il permet aussi la confrontation des idées, la mise en place d’expériences et augmente ainsi le niveau de compétences de chacun, notamment par la transmission.
- Les valeurs : partager un système de valeurs permet là encore d’augmenter la cohésion, la coopération et donc de développer une force et une forme de protection pour chaque collaborateur. Cela permet aussi « d’engager un processus d’intelligence collective » augmentant ainsi la valeur ajoutée.
- Le cadre, ou la nécessité pour le manager de fixer des frontières avant de lancer n’importe que projet lui permettant ainsi de gérer la créativité et l’énergie de ses équipes. Pas besoin d’aller très loin pour se rendre compte de la nécessité de la mise en place de ce principe. Il suffit juste de se dire que c’est l’une des premières loi permettant la vie (ou l’assemblage de cellules dans un cadre protégé comme le corps pour éviter toute dilution).
- La créativité : nos deux auteurs insistent sur l’importance des neurones dits « miroirs ». Ces neurones, par un système de mimétisme propre à chaque être vivant, sont essentiels et doivent être pris en compte dans notre rapport à l’autre y compris dans le cadre du travail : ce sont eux qui nous permettent de rentrer en relations avec les autres, de ressentir leurs émotions (ne sourit-on pas quand un inconnu éclate de rire dans le métro ?) et développer ainsi notre créativité en empruntant notamment à la nature tout ce qui nous parait bien ! Toujours selon nos auteurs, « dans un monde où l’activité et la rentabilité demeurent prioritaires, les éléments nécessaires à l’émergence de la créativité, le vide, le silence, la poésie et l’audace, doivent retrouver leur place. »
- Le temps où la notion de cycle prend tout son sens. Les rythmes de la nature (les saisons, les marées…) nous rappellent que l’être humain obéit aussi à des cycles (sommeil, travail…) qu’il est nécessaire de prendre en compte dans le cadre d’un management bienveillant, et ne pas miser uniquement sur les capacités d’adaptation de chacun.
- La mémoire, ou l’importance de la transmission d’une mémoire vivante de l’organisation.
Ces neuf principes sont donc la base sur lesquels les managers doivent s’appuyer pour faire évoluer les choses. Les parallèles réalisés par les auteurs entre les modes de management d’aujourd’hui et les organismes vivants ou la manière dont les Kagabas gèrent leur quotidien grâce à leur observation et leurs liens avec la nature, nous permettent de recontextualiser les choses et de nous reconnecter avec des principes de vie oubliés ou laissés de côté.
Pour conclure, « le propos n’est pas d’être optimiste ou pessimiste, mais de proposer aux managers, sur la base d’informations factuelles – témoignages, statistiques, connaissances scientifiques mises en perspective avec le témoignage d’un mode de vie différent (celui des Kagabas) -, de « réfléchir » et de « questionner » leur savoir-être, afin de tenter le choix du vivant. […] Etre en position de leader implique avant tout des savoir-être et pas seulement des savoir-faire, dont les livres sur le management sont remplis et les formations saturées. Car même l’enseignement se plie aux dogmes sociaux du quantitatif, en ajoutant toujours plus de techniques ou d’outils, quand les savoir-être ne sont toujours pas, ou si peu, enseignés. Une lacune qui devient un réel handicap dans les entreprises. »
Eric Julien sera présent lors de notre colloque Philosophie, RH & Management. Venez partager sa vision et échanger avec lui, Olivier Lajous, Frère Samuel Rouvillois, Thibaud Brière, Alexandre Jost, Frédéric Henrion, et Antonella Cellot-Desneux lors de notre journée de réflexion et d’inspiration du 29 juin prochain. Pour s’inscrire et connaître le programme détaillé, contactez-moi (emilie@adesidees.com / 01 46 34 85 04)
Emilie GAUDIN, chef de projets Adesidées
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